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Grégoire Jeanmonod

Encore de la soupe...


D'habitude, je m'abstiens de m'exprimer sur des événements déjà largement commentés.


Mais aujourd'hui, j'ai envie de donner mon avis sur ces images que vous avez tous déjà vues mille fois. Après tout, quand une colère légitime s'exprime de manière aussi désespérée, le moins qu'on puisse faire, c'est tendre l'oreille et réfléchir.


D'abord, dépassionnons.


Que s'est-il passé? On a balancé de la soupe sur la Joconde. Sur la Joconde, vraiment? Non: sur la vitre blindée qui protège la Joconde. Tout ce qu'on peut déplorer, finalement, c'est le surplus de travail imposé aux équipes de nettoyage du musée.


Le truc, c'est que ces militantes, comme avant elles les "assaillants" des Meules de foin de Monet et des Tournesols de Van Gogh, ont compris qu'il était plus efficace aujourd'hui pour attirer l'attention de s'attaquer à des trésors artistiques que d'entarter des ministres.


D'ailleurs, à en juger par la diffusion de ces images, on pourrait se dire qu'elles ont gagné leur pari.


Oui mais... non. Parce qu'elles ont oublié la base. Marshall McLuhan: "The medium is the message." Le moyen choisi pour s'exprimer est encore plus important que le message en lui-même. Car il est porteur d'un sens plus immédiat que les propos tenus.


Pour qu'un message soit audible, il faut donc qu'il y ait correspondance entre le message et la manière dont il est délivré, ou le "medium" utilisé.


Voilà ce qui rend ces actions, il me semble, assez stériles: l'absence de corrélation entre les problèmes soulevés et les oeuvres d'art prises pour cibles.


Si ces militantes avaient voulu dénoncer le "male gaze" qui sévit dans notre culture, viser la Joconde aurait été un choix discutable, mais au moins compréhensible.


Si elles avaient porté un message écologiste en manifestant contre une foire d'art contemporain qui fait dresser des barnums climatisés dans le désert, leur démarche aurait semblé cohérente.


Mais là... Rien ne colle. Et ce manque de congruence apparaît dans leur propre discours: "Qu'est-ce qu'il y a de plus important? L'art ou le droit à une alimentation saine et durable?" Mais quel rapport? Pourquoi aurions-nous à choisir?!


D'ailleurs, ce type de "coup d'éclat" sert-il vraiment la cause? Combien parmi nous ont foncé sur le site de Riposte Alimentaire pour comprendre leur combat? Combien de commentaires ont porté sur la question agricole, plutôt que sur le bien-fondé de leur action?...



Ce qui m'inquiète vraiment, dans tout ça, c'est que cette forme d'activisme qui prend l'art pour cible - aussi légitime soit-il dans ses aspirations - risque de diffuser lentement mais surement une idée dangereuse: la culture serait l'adversaire de la cause environnementale.


Faut-il rappeler que Leonard de Vinci était un amoureux de la nature et un observateur passionné de la biodiversité?

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