Claude Monet
les Nymphéas, soleil couchant
1915-26
Mettre en condition
Quand la France sort victorieuse de la Première Guerre Mondiale en 1918, Claude Monet est un artiste septua-génaire, respecté pour son oeuvre
mais considéré par beaucoup com-
me un homme du passé: après la
révolution du Cubisme, l'Impression-
nisme qui a bouleversé le monde de
l'art quarante ans plus tôt fait déjà
partie de l'histoire. Pourtant, malgré
son âge avancé, Monet veut prendre
part à l'actualité en célébrant, à sa
manière, la victoire des poilus.
Par l'intermédiaire de son ami Georges Clémen-
ceau, il propose d'offrir à l'Etat Français un en-
semble d'oeuvres qui l'occupe depuis trois ans
déjà et qu'il appelle ses "Grandes décorations".
Ces toiles immenses - certaines, accolées sur des pan-neaux juxtaposés, mesurent jusqu'à 17 mètres de large - représentent les nymphéas de ses bassins de Giverny à
différents moments du jour. Des oeuvres à la limite de l'abstraction, qui prouvent que la vigueur et l'audace du
vieil homme sont intactes. Le projet accepté, le
peintre impose ses conditions: il exige que ses
oeuvres - alors encore en cours d'exécution -
soient exposées selon ses directives. Et ses idées
sont aussi précises... que complexes à mettre en
oeuvre. Monet souhaite en effet proposer une
expérience inédite aux spectateurs en les immer-
geant littéralement au milieu de ses toiles grâce à
un dispositif d'accrochage ellipti-
que. Il faudra pas moins de six
années de négociations, d'inter-
minables tergiversations sur le
choix du lieu, d'innombrables
plans revus par Monet lui-même
et des mois de travaux pour fina-
lement transformer l'Orangerie des Tuileries en espace d'exposition. Enfin, en 1924, deux grandes salles ovales baignées d'une lumière zénithale sont prêtes à accueil-lir les vingt-deux toiles géantes. Mais Monet retouchera ses Nymphéas jusqu'à sa mort deux ans plus tard, date à laquelle ils seront installés dans leur écrin sur-mesure. Pour la première fois de l'histoire, un peintre s'est fait scénographe de ses propres oeuvres, pour plonger les visiteurs, disait-il, "au centre d'un aquarium fleuri".
les Nymphéas, reflets verts
Camille Lefebvre,
Plan du Musée de l'Orangerie, 1922
Orangerie, salle n°2, 1926
Ce qu'on peut en retenir:
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Même la meilleure des idées et le plus stimulant des projets ont peu de chance de susciter l'adhésion s'ils sont présentés au mauvais moment, au mauvais endroit. Pour convaincre, fédérer et motiver, il convient de réfléchir aux conditions les plus appro-priées pour délivrer notre message, et d'aménager un contexte favorable à l'attention et à la réceptivité de nos interlocuteurs... Même si cela demande du temps et des efforts.