Egon Schiele
Cardinal et Nonne
1912
Admirer sans imiter
En 1907, le peintre en devenir Egon Schiele, Autrichien alors âgé de 17 ans, fait la connaissance de son idole Gustav Klimt, de 30 ans son aîné. Artiste reconnu et membre fondateur du mouvement
d'avant-garde baptisé "Secession Vien-
noise", Klimt devient rapidement le maître
- tant artistique que spirituel - de Schiele:
le jeune homme marche dans les pas de
son ami et mentor, en qui il voit "un artiste
d'une perfection inouïe".
Schiele revendiquait volontiers cette filia-
tion. Mais si beaucoup de ses oeuvres
rendent compte de l'influence du maître,
il a néanmoins veillé à développer un style personnel, d'une singularité frappante, en s'inspirant du travail de Klimt sans pour autant l'imiter scrupuleusement. Le
meilleur exemple de cette posture - entre admiration et émancipation - nous est fourni par sa toile de 1912
Cardinal et Nonne. Tout en citant explicitement l'un des
chefs d'oeuvre de Klimt, le Baiser, Schiele
s'en distancie en en bouleversant radicale-
ment le sens . Alors que l'oeuvre de Klimt,
figurant un couple agenouillé et enlacé
dans un décor doré, était une ode à la
pureté de l'amour, celle de Schiele, qui
représente les ébats interdits d'une nonne
et d'un cardinal exactement dans la même
position, se veut résolument sulfureuse.
Fidèle à son goût de la provocation et à ses opinions anticléricales, Schiele dé-tourne l'oeuvre exaltée de son mentor pour livrer une charge contre le dogme catholique.
Gustav Klimt, le Baiser, 1909
Ce qu'on peut en retenir:
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Apprendre de nos aînés, maîtres ou mentors ne signifie pas singer leurs modes de travail ou de pensée. Au contraire, il est plus constructif de s'en distancier en associant leurs leçons à nos aspirations et intuitions personnelles. C'est dans cette appropriation, à la fois libre et respectueuse, que réside la finalité de la démarche pédagogique.