Vincent Van Gogh
l'Arlésienne
1889
Travailler avec... et malgré l'autre
Son ami Paul Gauguin vient de le rejoindre à Arles, et ensemble ils demandent à Marie Ginoux, tenancière du Café de la Gare, de poser pour eux. L’intéressée
accepte et les retrouve vêtue de son
costume traditionnel. Mais des deux
artistes c’est le charismatique Gauguin qui
a ses faveurs: elle s’installe face à lui et le
regarde dans les yeux pendant qu’il des-
sine son portrait au fusain. Van Gogh,
déporté sur le côté de la scène, doit se
contenter d’une vue oblique sur l'Arlé-
sienne: en une heure il brosse donc ce
portrait touchant, qui doit paradoxalement
son charme et son originalité à la gêne
occasionnée par la présence de Gauguin
​
Cette Arlésienne de 1889 occupe une place particulière parmi les portraits de Vincent Van Gogh. Alors que jusque là l’artiste a toujours peint ses modèles fronta-lement, avec un contact visuel direct qui
conférait à leur regard une intensité saisis-
sante, il représente ici une femme presque
de profil, les yeux dans le vague, comme
surprise en pleine rêverie. L’intensité du
face-à-face laisse ainsi la place, comme
jamais auparavant chez Van Gogh, au char-
me du mystère et de la mélancolie.
​
Si le peintre rompt ici aussi fermement avec
ses habitudes de portraitiste, ce n’est abso-
lument pas par choix, mais par contrainte.
Paul Gauguin
l'Arlésienne, 1889
Ce qu'on peut en retenir:
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Travailler en équipe implique de renoncer à un confort personnel pour s’accommoder de la présence des autres, de leurs habitudes et exigences. Cette contrainte, parfois mal vécue, est pourtant fertile car elle nous oblige à débrancher notre pilote automatique pour envisager de nouvelles manières de travailler. « L’enfer c’est les autres » disait Sartre, mais cela a parfois du bon…